La réglementation régissant la fiscalité locale est touffue et complexe. Au-delà des quatre vieilles, elle recouvre bien d'autres impots et taxes que les équipes municipales ou départementales doivent connaître s'ils veulent bénéficier des marges de manœuvre qu'elles permettent. Pour autant, le pouvoir fiscal des collectivités territoriales et des communautés est très strictement encadré par la législation. Au regard de la constitution, la loi créée les impôts et taxes, prévoit les modalités de détermination des bases, encadre la liberté de vote des taux offertes aux collectivités et fixe les cas d'application des exonérations, abattements et dégrèvements.
-1- Délimitation du champ d'application de la fiscalité locale pour les communes et les départements.
Maitriser la large étendue des impots et taxes relevant de la fiscalité directe mais aussi de la fiscalité indirecte locale doit permettre à chaque collectivité d'identifier les marges de manœuvre potentielles et les leviers à sa disposition pour financer les actions et opérations figurant dans le programme électoral des élus.
Les impôts sont des prélèvements obligatoires perçus par voie d'autorité. Les taxes sont des impôts mais elles sont toutefois la contrepartie d'un service dont les contribuables sont en situation de bénéficier. A la différence des redevances, les taxes ne sont pas proportionnelles au service rendu.
La fiscalité directe est payée nommément par le contribuable qui est également le redevable. Elle est basée sur une assiette constante. A l'inverse la fiscalité indirecte s'applique à une base fluctuante. Elle touche le plus souvent la consommation et est prélevée par le fournisseur du service qui en reverse le montant à l'administration bénéficiaire.
Les quatre principales taxes directes locales perçues par les communes et les départements concernent la taxe d'habitation (TH), la taxe sur le foncier bâti (TFB), la taxe sur le foncier non bâti (TFNB) et la taxe professionnelle (TP). Dans leur forme actuelle, ces taxes ont été créées au milieu des années 70, entre 1974 et 1976, mais elles prennent la suite de taxes plus anciennes. En complément de ces 4 taxes directes, les communes ou les EPCI gérant au moins la collecte des déchets peuvent percevoir également la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Les communes bénéficient d'autres impositions directes moins importantes qui sont souvent qualifiées de « recettes de poche ». Il s'agit de la taxe de balayage, de la taxe sur les trottoirs, de la redevance communale et départementale des mines et de l'imposition forfaitaire sur les pylônes.
Les communes adhérentes à un syndicat intercommunal percevant des contributions communales ont la possibilité de demander à ce que ces dernières soient fiscalisées, c'est à dire transformées en taux par les services fiscaux. Pour autant, dans ce cas de figure, sur un plan strictement juridique, ces taux restent des taux communaux.
Tel n'est pas le cas des taux appliqués à la fiscalité propre votée par les communautés. Seules les communautés de communes ainsi que les communautés urbaines existantes avant le 12 juillet 1999 qui n'ont pas mis en place la TPU perçoivent une fiscalité propre additionnelle. En effet, toutes les autres communautés, communautés urbaines créée après 1999, communauté de communes et urbaines ayant adoptée la TPU, ou communautés d'agglomération ne perçoivent plus les taxes ménages. En contrepartie, les communes membres de ces groupements ne perçoivent plus la TP. Dans certains cas de figure, en cas de besoins financiers, la communauté levant la TPU peut instituer une fiscalité mixte qui est une fiscalité additionnelle sur les taxes ménages et en adopter les taux correspondants.
Ce qui change :
L'article 71 de la loi de finances rectificative (LFR) pour 2007 modifie le régime de la taxe communale pour la collecte, le transport, le stockage et le traitement des eaux pluviales.
L'article 73 modifie le régime des taxes communales sur la publicité en supprimant la taxe sur les véhicules publicitaires, en transformant la taxe sur les affiches, réclames et enseignes en taxes sur les affiches publicitaires mais aussi en revoyant l'assiette et les tarifs de ces taxes.
L'article 75 modifie le régime de l'impôt sur les spectacles en permettant aux EPCI compétents pour les équipements où se déroulent les manifestations de percevoir les sommes correspondantes.
L'article 102 de la loi de finances initiale pour 2008 permet aux syndicats mixtes composés exclusivement de communes, départements ou EPCI de percevoir le produit du versement transport.
-2- Détermination des bases de la fiscalité directe locale : des opérations complexes dont les collectivités ne peuvent se désintéresser.
Il revient aux services fiscaux de déterminer l'assiette des impôts directs locaux auxquels seront appliqués les taux de fiscalité votés par la collectivité. La valeur locative constitue en tout ou partie l'assiette de ces taxes. Cette valeur concerne le loyer annuel théorique que procurerait le bien en fonction d'un tarif au m² dépendant du secteur et de la surface réelle du bien, corrigée par les éléments de confort. Pour la TH, la base est la valeur locative de 1970 actualisée chaque année. Pour la TFB il s'agit de 50% de la valeur locative de 1970 actualisée et pour la TFNB de 80% de la valeur locative actualisée. Pour la TP, après les réformes prévues par les lois de finances pour 1999 et pour 2003, la base n'est plus constituée que de la valeur locative des immobilisations corporelles (immobilier - locaux et terrains ou mobiliers - matériel et outillage) utilisées par le redevable.
Ce qui change :
L'article 77 de la loi de finances pour 2008 prévoit une revalorisation forfaitaire des valeurs locatives de 1,6%.
L'intervention de la collectivité en matière d'assiette s'opère principalement à travers les travaux de la Commission Communale des Impositions Directes. Cette commission dresse, avec le représentant de l'administration fiscale, la liste des locaux de référence et des locaux retenus pour déterminer la valeur locative des biens imposables aux impôts directs locaux, détermine la surface pondérée et établit les tarifs d'évaluation correspondants.
Ce qui change :
L'article 83 de la loi de finances pour 2008 prévoit qu'une commission peut être instituée par les assemblées délibérantes des EPCI à TPU à la majorité simple. La Commission intercommunale n'intervient que pour la TP mais sa création dessaisit les CCID de leur compétence en matière de TP. La délibération de création de cette nouvelle instance doit intervenir avant le 1er octobre pour une application au 1er janvier de l'année suivante.
Les collectivités peuvent également aller au-delà et mettre en place de véritables observatoires fiscaux chargés de suivre l'évolution des la matière fiscale mais aussi d'identifier les erreurs ou incohérences afin de demander aux services fiscaux de procéder à des corrections et d'augmenter ainsi le rendement des taxes considérées.
-3- Fixation des taux : une liberté encadrée
En théorie, les collectivités territoriales disposent de la liberté d'adopter les taux de fiscalité. Elles doivent toutefois respecter certains plafonds et elles ne peuvent augmenter certains taux plus vites que d'autres.
Le plafonnement des taux
Pour les taxes ménages, les collectivités ne peuvent adopter un taux dépassant 2,5 fois le taux moyen départemental ou le taux moyen national s'il est supérieur. Pour la TP, le taux plafond s'établit à 2 fois la moyenne nationale. Le tableau suivant permet de préciser les valeurs applicables en 2008.
moyenne 2007 Taux plafonds 2008
TH 14.48% 36.20%
TFB 18.60% 46.50%
TFNB 44.47% 111.18%
TP 15.80% 31.60%
Pour les communautés adoptant la TPU, la fixation du 1er taux n'est pas libre et le taux plafond correspond à la moyenne pondérée des taux de TP votés par les communes l'année précédente. Pour la TEOM, il n'existe aucun taux plafond. En revanche, il est désormais possible d'instituer des taux différents en fonction de zones et de retenir une durée de convergence de 10 ans maximum en cas de taux différentiés.
Les règles de liaison entre les taux
Ces règles ont pour objectif d'éviter qu'une catégorie de contribuable soit lésée ou avantagée au détriment d'une autre. L'évolution de la TH est ainsi corrélée à l'évolution de la TP et de la TFNB. Seule la variation de la TFB est libre et n'emporte pas de conséquences sur les autres taxes. Ainsi, le taux de la TP ne peut évoluer plus vite que le taux de la TH ou que l'évolution moyenne pondérée des taux ménages si elle est plus faible. De la même manière, le TFNB ne peut évoluer plus vite que le taux de la TH. Quelques dérogations existent toutefois :
Une augmentation dérogatoire est offerte pour la TP qui peut augmenter jusqu'à 1,5 fois plus que le taux de TH ou que le taux moyen pondéré (TMP) de l'ensemble des taxes ménages s'il est plus faible.
Si la collectivité baisse ses taux ménages, elle peut ne pas baisser la TP. Dans ce cas, au cours des 3 années suivantes, elle ne pourra pas augmenter ce taux de plus de la moitié de la possibilité qui lui serait offerte dans le cadre de la déliaison à la baisse.
Une majoration spéciale est possible sur le taux de TP si ce taux est inférieur au taux moyen national et si le TMP communal sur les ménages est supérieur aux TMP national. La majoration s'établit à 5% du taux moyen national qui s'élève à 15,31% pour 2007. Par ailleurs, le taux de TP calculé dans le cadre de cette majoration spéciale ne peut dépasser le taux moyen national qui s'établit à 15.31% en 2008.
En outre, les EPCI à TPU ont la possibilité de mettre en réserve pendant 3 ans, les opportunités d'augmenter le taux de la TPU qu'ils n'auraient pas utilisées.
-4- Exonération, abattements et dégrèvements : mesurer l'impact pour les finances de la collectivité
Le régime des exonérations, abattements et dégrèvements est très complexe. Ces 3 mesures fiscales ont toute objet de réduire le montant payé par le contribuable. Certaines de ces mesures sont applicables de plein droit, d'autres sont laissées à l'appréciation des assemblées délibérantes, d'autres encore s'appliquent mais l'assemblée peut décider par délibération de les supprimer. Bien évidemment, les mesures décidées par les collectivités ne donnent pas lieux à compensation de l'Etat. Exonération et abattements concernent la base taxable. L'exonération conduit à sortir en tout ou partie une matière taxable du champ d'application d'une taxe. Un abattement diminue le montant de la base taxable. A l'inverse, un dégrèvement réduit le montant de l'imposition due par le contribuable.
Ce qui change :
L'article 119 de la LFR pour 2006 prévoit une exonération facultative de TFB pour les habitations construites avant la mise en place des zones « Seveso ».
L'article 120 de la LFR pour 2006 prévoit un abattement facultatif de TH pour les personnes handicapées ou invalides.
L'article 124 de la loi de finances rectificative (LFR) pour 2006 prévoit le plafonnement des augmentations de valeurs locatives si elles dépassent 30%.
L'article 126 de la LFR pour 2006 prévoit la possibilité de mettre en place une taxe facultative sur les friches commerciales.
L'article 77 et 78 de la LFI 2007 prévoit une exonération facultative de TH et TFB pour les établissements hôteliers situés en ZRR.
L'article 27 de la loi de finances rectificative (LFR) pour 2007 prévoit exonération et un dégrèvement de TH et de TFB pour les personnes âgées habitants une maison de retraite mais ayant conservé la jouissance de leur ancienne habitation.
L'article 70 de la loi de finances initiale pour 2008 prévoit une exonération facultative de la TP pour les libraires indépendants.
L'article 76 de la loi de finances initiale pour 2008 élargit le champ d'application de l'exonération pour les cinémas d'art et d'essais.
L'article 82 de la loi de finances initiale pour 2008 prévoit la prise en compte des retraits de compétences d'un EPCI pour déterminer le taux de TP de référence servant à calculer le ticket modérateur (plafonnement de la TP à la valeur ajoutée) et pour les communes et pour l'EPCI .
L'article 62 de la loi du 5 mars 2007 étend aux établissements existants au 1er janvier 2007, l'exonération de TP dans les ZFU.
L'autonomie et la marge de décision des collectivités publiques sont donc très limitées en matière de fiscalité. Le système est relativement complexe, difficilement lisible et doit être modifié mais aucune réforme d'ampleur n'a encore pu être conduite à son terme malgré les nombreuses tentatives observées depuis près de 30 ans.